Comme beaucoup de personnes, j’ai longé les quais de Seine pour voir comment se portait Notre-Dame au lendemain de son combat de toute une nuit contre l’incendie qui la ravageait.
La foule était vraiment impressionnante – il y avait non seulement beaucoup de parisiens et d’habitants des banlieues qui entourent la capitale, mais aussi beaucoup de touristes. On sentait de la douceur et de la révérence dans l’air, un sentiment palpable d’affection, d’appartenance commune, une façon de s’adresser à des étrangers comme à des voisins, un sentiment d’empathie.
La solidarité exprimée entre croyants et non-croyants a montré que quelque chose, au plus profond de notre humanité, avait été touché. Les amateurs d’art étaient en deuil, les croyants étaient atteints au cœur de leur foi, et les citoyens ainsi que les visiteurs réalisaient peut-être que certaines choses ne seraient plus jamais comme avant. Certains chefs-d’œuvre historiques et culturels humainement irremplaçables ont disparu à jamais. La fragilité de ce que nous pensions être parmi nous pour toujours accapare soudain notre attention.
Alors que je songeais à cela, après ma promenade, les signes qu’il y aurait un renouveau ont commencé à apparaître. De nombreuses déclarations de soutien financier ont commencé à affluer, en provenance de la France et du monde entier, et le Président français a également annoncé : « Nous la rebâtirons ».
La raison pour laquelle une grande diversité d’individus se sont spontanément rassemblés dans un même sentiment de révérence est peut-être qu’un sentiment similaire de perte irréparable, à grande échelle, a été ressenti d’une manière ou d’une autre dans la vie de tant de personnes. Tant parmi elles ont eu l’impression, à un moment donné, de toucher le fond, et ont pensé qu’il leur serait difficile de s’en remettre.
Quant à moi, j’ai apprécié cette phrase, extraite d’un poème de Mary Baker Eddy, la découvreuse de la Science Chrétienne, qui dit simplement : « Dieu bon, qui change toute perte en gain ! » (Ecrits divers 1883-1896, p. 389) Il est clair que cela n’est pas vrai de façon littérale, au regard de tout ce que nous ne toucherons ou ne verrons plus jamais. Mais des situations dramatiques peuvent nous amener à valoriser d’une manière nouvelle ce que nous avions autrefois, à l’envisager en dépassant les apparences, ou simplement ce que l’œil voit, et à chérir les sentiments de majesté, de beauté et de permanence qui demeurent dans nos cœurs lorsque nous regardons plus profondément la vraie substance de ce que la chose « perdue » représentait.
Mary Baker Eddy pose cette question directe dans son livre, Science et Santé avec la Clef des Ecritures : « Qu’est-ce que la substance ? » Elle y répond ainsi : « La substance est ce qui est éternel et incapable de discordance et de décomposition. La Vérité, la Vie et l’Amour sont substance, dans le sens où les Ecritures emploient ce mot dans l’Epître aux Hébreux : "La substance des choses qu’on espère, l’évidence de celles qu’on ne voit pas". L’Esprit, le synonyme d’Entendement, d’Ame ou de Dieu, est la seule substance véritable. L’univers spirituel, y compris l’homme individuel, est une idée composée, reflétant la substance divine de l’Esprit. » (p. 468)
Puisque « La Vérité, la Vie et l’Amour » – qui sont des synonymes de Dieu, comme l’explique la Science Chrétienne – « sont substance », ils sont pour toujours avec nous, peu importe ce qui en parait aux sens matériels. Nous pouvons, par exemple, penser à « l’évidence [des choses] qu’on ne voit pas » comme à l’inspiration de l’Esprit divin qui nous anime avec le courage de recommencer, à l’énergie de la Vie divine qui nous donne la force de continuer, et à l’étreinte universelle de l’Amour illimité qui nous réconforte et nous encourage.
De même que quelqu’un, lorsqu’il touche le fond de la piscine, peut donner une impulsion pour remonter à la surface, nous pouvons nous tourner vers le Divin – la substance permanente et indestructible – pour trouver une inspiration nouvelle qui nous pousse et nous guide en avant. L’amour de Dieu nous invite tous à contempler avec une ardeur renouvelée les trésors de notre cœur. Et, lorsque nous considérons l’Esprit, Dieu, en tant que seule substance véritable, nous découvrons que le vrai trésor réside dans les qualités conférées par Dieu, telles que la joie, la force, la majesté et l’intelligence. La charpente en bois peut être détruite, mais les qualités qu’elle représente ne peuvent jamais être perdues, car Dieu les exprime dans Sa création spirituelle à chaque instant. Ainsi, nous pouvons non seulement nous souvenir et apprécier l’expression de ces qualités dans le passé, mais aussi les vivre activement et en voir de nouvelles preuves chaque jour.
Je trouve que l’histoire de Néhémie dans la Bible est une grande source d’inspiration à cet égard. Néhémie est profondément attristé d’apprendre que certaines parties de sa ville natale ancestrale sont en ruine. Mais sa confiance en Dieu lui permet de dépasser le deuil et de faire avancer activement le processus de reconstruction : « Le Dieu des cieux nous donnera le succès. Nous, ses serviteurs, nous nous lèverons et nous bâtirons ». (Néhémie 2:20) Et ils le font.
Une charmante parisienne, pleine d’espoir face à ce qui restait de la cathédrale Notre-Dame, m’a dit : « Ils ont tous les plans du toit qui a brûlé sur ordinateur. Cela prendra du temps, mais s’ils le veulent, ils pourront rebâtir. »
Le temps dira si c’est ce qui se produira. Mais quoi qu’il advienne de la structure physique, lorsqu’il s’agit d’une perte à grande échelle, qu’elle soit personnelle ou collective, nous pouvons considérer la nécessité de « rebâtir » comme une opportunité de renouveau spirituel qui révèle ce qu’il y a de meilleur en chacun de nous. C’est une possibilité prometteuse et stimulante qui se trouve au cœur de chacun, où qu’il soit dans le monde, car la véritable substance – l’expression éternelle de la Vie et de l’Amour divins – ne peut jamais être détruite.
O Vie, en Toi tout l’univers
Trouve un splendide renouveau ;
. . . . .
Pour eux, l’horizon s’élargit,
Ils marchent d’un pas libre et fort ;
La Vie a fait s’enfuir la mort,
La Vie, en qui tout refleurit ! »
(Samuel Longfellow, Hymnaire de la Science Chrétienne, No. 218, traduction © CSBD)