Il y eut un temps où nous crûmes que la matière pouvait rendre malade; puis, la constatation que le traitement en Christian Science modifiait les conditions matérielles nous obligea à conclure que la maladie est mentale. Or, dans ce changement d'attitude à l'égard de la maladie, on est parfois enclin à exagérer l'importance de cet esprit mortel qui la produit. A la place de la vieille crainte de la matière et de ses lois, se dresse une nouvelle,— celle de l'esprit mortel et de son pouvoir. La démonstration a été faite que les intempéries, les brûlures, les aliments, par exemple, ne sauraient nuire. Mais il arrive qu'on prête une influence néfaste à l'esprit mortel, à la propre crainte de chacun. Voici le raisonnement tenu: "Quand la crainte est surmontée, la maladie disparaît automatiquement. Donc, prenons garde de ne pas avoir peur. La crainte est une cause: elle est susceptible d'engendrer le mal; elle peut nous atteindre; elle a une puissance."
Certes, Jésus le Christ chassa bien des fois la crainte avant que la guérison ne se manifestât. "Ne crains point, crois seulement," dit-il au chef de la synagogue; puis il ressuscita la fille de cet homme. Il tança l'angoisse de ses disciples avant que ne se calmât la mer orageuse de Galilée. Mary Baker Eddy, en expliquant la loi de la guérison par laquelle Jésus et ses disciples accomplirent leurs cures, souligna la nécessité de détruire la crainte pour guérir la maladie. Elle dit dans "Science et Santé avec la Clef des Écritures" (p. 410): "La pratique scientifique et Chrétienne commence par la note tonique de l'harmonie que nous a donnée le Christ: 'N'ayez point de peur!' " La maladie est une sensation de souffrance, un sentiment du mal, une supposition que la discorde existe. Cette peur que la paix puisse être troublée doit être bannie, évidemment. Mais elle n'a rien de formidable. Elle n'est qu'un "homme de paille" qui ne saurait rendre les coups ou agir de lui-même.
Distinguer le fait que la crainte et la maladie sont une seule et même chose, ce n'est pas atteindre "la conclusion de toute l'affaire." C'est le raisonnement suivant qui est le plus important. Mrs. Eddy écrit (Science et Santé, p. 391): "La crainte est la source de la maladie, et vous maîtrisez la crainte et le péché par l'Entendement divin; il s'ensuit que c'est par l'Entendement divin que vous surmontez la maladie." C'est-à-dire, la crainte est aussi complètement impuissante, aussi certainement sans cause que la maladie guérie.
La croyance que la crainte peut produire une chose réelle est impossible chez le chrétien qui obéit au Premier Commandement et qui ne donne de puissance qu'au seul Dieu. A mesure que nous saisissons le fait que l'Entendement dispose de la puissance, nous devons veiller à ne la donner qu'à lui seul. La crainte n'appartient qu'à l'entendement mortel — dont Mrs. Eddy a dit à la page 114 de Science et Santé: "Employer le terme entendement mortel, c'est faire un solécisme, et cela implique l'usage inexact du mot entendement. Puisque l'Entendement est immortel, la locution entendement mortel implique quelque chose de faux et partant d'irréel; et telle qu'elle est employée dans l'enseignement de la Science Chrétienne, elle sert à désigner ce qui n'a pas une existence réelle." Mrs. Eddy nous montre invariablement à travers ses ouvrages qu'elle n'accorde ni pouvoir ni autorité à l'entendement mortel; elle l'écrit toujours en lettres minuscules, mettant les majuscules à l'Entendement véritable qui est Dieu; elle l'accompagne de termes tels que "supposé" et "soi-disant." A la page 469 de Science et Santé elle dit avec une clarté cristalline: "L'exterminateur de l'erreur est la grande vérité que Dieu, le bien, est l'unique Entendement, et que le contraire supposé de l'Entendement infini — appelé diable ou mal — n'est pas l'Entendement, n'est pas la Vérité, mais l'erreur, sans intelligence ni réalité."
"Ne crains pas la frayeur soudaine," tel est le commandement de l'Écriture. Nous ne devons pas appréhender l'entendement mortel et ce qu'il peut nous faire, mais comprendre plutôt l'impotence de la crainte. Parfois, dans sa tentative de soulager la souffrance d'un malheureux, un Christian Scientist se découvrira en train de penser: "Si seulement je pouvais détruire sa crainte!" Apprenons que la crainte, qui "implique le châtiment," n'a certainement aucune part en Dieu, le bien, qui est l'Amour parfait. Aussi ne saurait-elle avoir un seul iota de puissance; elle ne saurait rendre malade. Crainte, ou pas crainte, la loi de Dieu est aussi perpétuellement opérante et aussi impossible à arrêter que la loi que "deux fois deux font quatre." Il suffit de nous plier au commandement: "Arrêtez, et reconnaissez que je suis Dieu." L'harmonie est la loi de la Vie; la guérison est présente, que la crainte s'en aille ou pas — au sein même des apparences de cette dernière.
"L'exterminateur de l'erreur est la grande vérité que Dieu, le bien, est l'unique Entendement." Voilà qui est démontrable. Nous n'avons pas à lutter pour "affronter la crainte" qui "cause la discorde." Dieu est la seule cause. Donc, il n'y a rien à "affronter." Quand nous comprendrons ce fait et l'affirmerons, quand il dictera nos actes, l'harmonie apparaîtra toujours. La règle à suivre pour guérir se trouve dans ce passage biblique: "Réconcilie-toi donc avec Lui; tu seras en paix et le bonheur te sera rendu." Et nous avons la domination, car nous sommes tous "cohéritiers de Christ." Chaque étudiant de la Bible sait à quel point Jésus était supérieur à toutes les conditions matérielles. La réalisation de cette vérité prouve la conscience de l'union essentielle entre l'homme et la toute-puissance, et annihile la crainte aussi aisément que la lumière remplace les ténèbres. Il est impossible d'être conscient de la domination et de la crainte en même temps. Nous ne devrions jamais nous demander avec angoisse si notre compréhension de la loi de guérison du Christ surpasse notre crainte. Cette dernière n'a absolument aucune force. La puissance de Dieu est tout entière dans la compréhension juste et elle est invincible. Dans le "Christian Science Hymnal" se lit un chant de glorieuse confiance (No. 176), dans lequel se trouvent ces lignes:—
La pensée pleine de Toi est bien plus puissante
Que ne le sont le péché, la douleur et le chagrin.
En réalité, l'homme véritable ne peut pas craindre. Expression de l'Entendement infini, il n'a aucun élément de faiblesse. "Car Dieu ne nous a pas donné un esprit de timidité, mais un esprit de force, d'amour et de prudence." Ce passage comme tant d'autres de la Bible proclame la perfection des enfants de Dieu. De plus cette perfection est permanente et inaltérable. "Tout ce que Dieu fait subsiste à toujours: on ne peut rien y ajouter, ni rien en retrancher."
Notre droit d'aînesse est une liberté complète à l'égard de la crainte. Dans Science et Santé Mrs. Eddy ne se lasse pas de répéter comment nous pouvons entrer en possession de ce droit. Au sixième verset du cinquante-troisième psaume se lit une description de toute la famille humaine: "Soudain, ils ont été saisis de terreur, là où il n'y avait point de sujet de terreur." Sachons nous sortir d'une situation aussi absurde. La seule crainte réelle est "la crainte de l'Éternel." Cette qualité est justement à l'opposé de sa contrefaçon, l'appréhension et l'anxiété, car le sage écrit au quatorzième chapitre des Proverbes: "Il y a une ferme assurance dans la crainte de l'Éternel." Certes, une telle crainte amène avec elle une grande paix. Sa présence rassurante chasse sa contrefaçon humaine et ne laisse que la joie et la quiétude.
Au huitième chapitre des Proverbes nous lisons que "craindre l'Éternel, c'est haïr le mal." C'est là un autre aspect de la crainte véritable qui aboutit à des bénédictions. "Haïr le mal," aimer le bien, n'a jamais rendu un homme malade ou malheureux. Une harmonie toujours croissante peut seule en résulter. D'autres craintes ne produisent rien.