Tous les lecteurs de la Bible connaissent la parabole des talents, qui débute ainsi: "En effet, il en sera comme d'un homme qui, partant pour un voyage, appela ses serviteurs et leur confia ses biens." Elle raconte ensuite qu'avant de partir il donna à l'un cinq talents, à un autre deux, et à un troisième un seul, "à chacun selon sa capacité." Puis le récit montre comment celui qui avait reçu les cinq talents réussit, en les employant, à s'en procurer cinq autres, comment celui qui en obtint deux, en gagna deux de plus. Mais, par contre, le détenteur de l'unique talent prêta l'oreille aux suggestions de la crainte et de la paresse et, enfouissant ce qu'il avait reçu, n'en tira absolument rien. A son retour, le maître des serviteurs, réglant ses comptes, dit à ceux qui s'étaient montrés fidèles, diligents et attentifs: "Cela va bien, bon et fidèle serviteur; tu as été fidèle en peu de choses, je t'établirai sur beaucoup; entre dans la joie de ton Seigneur." Quant au serviteur paresseux et inutile, on le jeta dans les ténèbres du dehors après lui avoir repris le talent.
Élevons notre idée du "talent" au-dessus du sens de faculté physique ou intellectuelle qu'on lui accorde en général. Donnons-lui le sens que Mrs. Eddy lui confère quand elle dit (Science et Santé, p. 366): "Si nous voulons guérir par l'Esprit, nous ne devons pas cacher le talent de la guérison spirituelle sous l'enveloppe du formalisme, ni ensevelir la morale de la Science Chrétienne dans le linceul de la lettre." Nous sommes ici face à face avec le fait que, comme Christian Scientists, nous possédons tous ce talent dans la mesure où nous comprenons cette Science, et qu'il nous incombe d'utiliser et de développer la faculté de guérir non seulement la maladie mais aussi les troubles et les limitations dont souffre la famille humaine. Nos succès dans cette voie déterminent notre usage de la faculté que Dieu nous donne et de nos progrès dans la compréhension de Sa nature et de nos rapports réciproques. La Bible et les ouvrages de Mrs. Eddy nous rappellent constamment que c'est dans la mesure où nous mettons en pratique ce que nous savons déjà que nous pouvons obtenir davantage.
Comment, pour éviter de nous enliser, pouvons-nous mettre à profit ce que l'étude de la Christian Science nous dévoile? Mrs. Eddy répond à cette question d'une façon très complète à la page 116 de "Miscellaneous Writings" où elle dit: "Jamais absent de notre poste, jamais inattentif, jamais de mauvaise humeur, jamais indisposé à travailler pour Dieu,— voilà l'obéissance; c'est être 'fidèle en peu de choses.' " A première lecture, ces lignes nous poussent à nous exclamer que c'est là être fidèle à bien des choses. Certes, pareille fidélité sous-entend la perfection, une sommité vertigineuse à atteindre. Mais que peut bien signifier l'usage du "talent de la guérison spirituelle," sinon la réflexion constante de l'Entendement divin, en tout temps et en toute circonstance,—être sans cesse occupé des affaires du Père? Notre poste n'est pas forcément le bureau d'un praticien de la Christian Science, mais il est toujours à la porte de la conscience humaine. Notre devoir est de surveiller nos pensées et de n'en admettre aucune à l'égard de l'homme et de l'univers que nous n'admettrions pas à l'égard de Dieu. Que notre poste soit le bureau, le home, la rue ou la campagne, nous ne saurions jamais y être dans l'inaction, car il y a sans cesse quelque pensée demandant l'admission, et toutes doivent être affrontées et examinées, admises ou rejetées.
Être sur ses gardes, c'est ne jamais céder à la suggestion que si nous ne donnons pas un traitement, si nous ne sommes pas officier d'église ou engagé enfin dans un travail qui se rattache spécifiquement à la Christian Science, nous pouvons permettre à nos pensées de vagabonder dans le matérialisme. A vrai dire, l'indolence nous est interdite alors plus qu'à n'importe quel moment, et l'inaction devrait être inconnue. "Ils servent aussi ceux qui savent tenir et attendre." "Tenir" et "attendre," voilà ce qu'il est parfois dur d'apprendre. Mais ni tenir ni attendre n'impliquent la paresse, et il se peut même qu'en nous bornant à tenir la bannière de la Vérité, en prouvant la puissance protectrice et directrice du Principe, nous accomplissions plus que nous ne pensons. Puisque la même source ne saurait répandre à la fois de l'eau douce et de l'eau amère, il va de soi que l'attitude de pensée qui guérit n'a rien de commun avec l'aigreur, la crainte et la haine, l'adversaire supposé de l'Amour divin qui est le cœur et l'âme même de la guérison chrétienne. Ne jamais éprouver de mauvaise humeur, c'est avoir à coup sûr de très hautes visées; c'est bien pour elles, cependant, que les Christian Scientists luttent, et ils parviendront au but quand ils auront une compréhension plus complète des rapports entre Dieu et l'homme. Que de fois l'ange de Sa présence est à notre côté, nous indiquant la voie ascendante à l'instant où les prétentions de l'intérêt, de la fatigue, des soucis et des joies de ce monde tiennent à ce que nous refusions de répondre à l'appel du devoir! Qui n'a jamais eu l'occasion d'être heureux et reconnaissant de ce que ces anges soient constamment à nos côtés pour nous garder dans la voie tracée par le grand Maître, la voie du service volontaire et dévoué pour Dieu et pour l'homme? Être toujours prêt à travailler pour Dieu signifie demeurer perpétuellement dans la compréhension que la Vie est spirituelle non matérielle; et cela parce que, comme il n'y a qu'un Entendement unique, il n'y a qu'une idée vraie sur n'importe quel sujet, n'importe quel événement. Ainsi nous serons capables de substituer avec intelligence les faits actuels au faux sens des choses qui se présente à nous.
La meilleure façon de travailler pour Dieu, c'est d'être toujours conscient de la perfection de Sa création, ici et maintenant, car ce n'est qu'avec cette vérité que nous pourrons affronter et maîtriser toutes les fausses prétentions sur la création. Mrs. Eddy souligne tout spécialement ce point à la page 242 de "The First Church of Christ, Scientist, and Miscellany," où elle dit: "A moins que vous ne distinguiez parfaitement que vous êtes l'enfant de Dieu, en conséquence parfait, vous n'avez ni Principe à démontrer ni règle pour sa démonstration." Envisager notre tâche d'un autre point de vue, c'est être médiocrement préparé à veiller sans cesse, c'est accomplir peu de bien, et qui sait, beaucoup de mal. Pour faire valoir le talent de la guérison spirituelle, il s'agit d'employer les talents que Dieu nous donne, jugeant nos pensées et nos actes par la pierre de touche du Principe, jusqu'à ce que, nous aussi, nous méritions cette bénédiction: "Cela va bien." "Les consciencieux réussissent," nous rappelle Mrs. Eddy (Miscellaneous Writings, p. 340). "Ils persévèrent fidèlement; à travers la mauvaise et la bonne réputation, ils vont vers l'accomplissement du bien; c'est par la patience qu'ils héritent de la promesse. Sois actif, et si lent que tu sois, ton succès sera certain: labeur signifie triomphe, et — tu as été fidèle en peu de choses."
