La croyance antique qu'un prophète est un homme qui peut prédire l'avenir grâce à un don particulier de la Providence, a fait place petit à petit à la conception qu'il perçoit dans une certaine mesure l'opération de la loi divine et détermine d'une façon plus ou moins mathématique les suites d'une activité, et cela par son attachement aux plus hauts idéals et sa consécration au bien suprême. C'est ici, en effet, qu'il faut chercher la prophétie authentique; et comme Dieu ne fait pas acception de personnes, la vision prophétique est à la portée de chacun en proportion de son attachement au Principe.
Selon le récit biblique, la fausse prophétie commença dans le jardin d'Éden et prédomine encore aujourd'hui, ressemblant fort au serpent trompeur qui déclara que le fait de manger du fruit de la connaissance terrestre n'entraînerait pas la mort. Notre monde résonne des clameurs des faux prophètes, aussi s'agit-il de nous mettre attentivement aux écoutes d'un témoignage plus haut que celui des sens physiques pour pouvoir distinguer l'un de l'autre. Le cours de notre existence dépend pour une grande part de notre faculté de faire cette distinction. Il est donc de la plus haute importance d'acquérir une connaissance suffisante de la Vérité pour discerner la route que nous montre la prophétie véritable.
Tout étudiant sincère de la Christian Science se voue chaque jour à la tâche de connaître l'idée véritable et de se détourner de son contraire. Cette lutte quotidienne pour la démonstration de la suprématie du bien peut n'avoir rien de facile; elle demande la patience et la persévérance. Une vision nette de la fausseté des arguments de l'erreur est l'un des plus précieux soutiens de l'étudiant à l'heure où celle-ci semble exercer un pouvoir écrasant. En d'autres termes, ce pouvoir apparent est brisé quand on démasque ses origines. Dans son livre, "Science et Santé avec la Clef des Écritures" (p. 540), Mrs. Eddy a souligné cette vérité importante par l'explication suivante: "Dans la chimicalisation morale, lorsque les symptômes du mal, qui est illusion, s'aggravent, nous pouvons croire, dans notre ignorance, que le Seigneur a produit le mal; mais nous devrions savoir que la loi de Dieu ne découvre le soi-disant péché et ses effets, que pour permettre à la Vérité d'anéantir tout sens du mal et tout pouvoir de pécher." Aussi est-il profitable parfois de regarder l'erreur bien en face afin de nous familiariser avec ses procédés et d'être de taille à résister à ses attraits trompeurs.
Comment ces faux prophètes, regardés courageusement, se présentent-ils? Leurs arguments rentrent dans deux catégories très distinctes. Les uns reposent sur une attitude de complaisance à l'égard du sens soi-disant physique des choses; les autres sur la crainte des lois faites par l'homme. La première thèse, qui a égaré des millions d'êtres, c'est la tentation de s'adonner au péché ou à la recherche de satisfactions purement mondaines, la crainte des conséquences étant tempérée par la promesse qu'en dernier ressort tout finira bien. Dans les efforts du mal pour étreindre l'humanité, quelle part faut-il attribuer aux séductions des faux prophètes de la croyance matérielle qui insistent que le bonheur doit provenir d'une accumulation de fortune, d'une grande popularité, ou encore de la gratification des sens? Ainsi parlait le serpent trompeur: "Vous ne mourrez nullement," et les faux prophètes que mentionnait Jérémie, conseillèrent au peuple de suivre les fantaisies de leur propre cœur sans appréhender de suites funestes.
La seconde thèse de la fausse prophétie, c'est la crainte. Qui peut dire quels sommets nous serions susceptibles d'atteindre si la crainte était entièrement détruite? St. Pierre, remarquant la violence du vent, prit peur, et, de ce fait, commença à sombrer; et St. Paul parle de ceux qui, "par la crainte de la mort, étaient toute leur vie retenus dans la servitude." Non seulement la crainte paralyse l'essor de ceux qui deviennent sa proie et les charge de lourdes chaînes, mais elle est directement responsable de notre asservissement à la maladie et aux limitations. Quand Job a dit: "Toutes les craintes que j'éprouve se réalisent," il s'est borné à être l'écho d'un fait qui devient de plus en plus frappant dans la conscience humaine, à savoir, que la crainte engendre une large part des maladies et des catastrophes qui affligent l'humanité. Il est donc évident que le poids du péché et de la maladie sous lequel le genre humain plie aujourd'hui, est imputable pour une grande part à ces deux thèses, à ces deux faux prophètes. Mrs. Eddy, en montrant cette vérité, déclare (Science et Santé, p. 373): "La crainte de la maladie et l'amour du péché sont les sources de l'esclavage de l'homme."
Comment donc affronter et vaincre ces prophètes menteurs? Il importe en premier lieu d'accorder une attention plus soutenue à l'étude des paroles de la prophétie véritable trouvée dans la Bible et dans Science et Santé. La Bible renferme bien des prophéties qui sont des mises en garde, en des paroles comme celles-ci:: "L'âme qui pèche, c'est celle qui mourra;" et "Le péché, étant consommé, enfante la mort." Les paroles de Mrs. Eddy, instrument de la pensée la plus hautement prophétique des temps modernes, nous apportent un concours précieux dans cette lutte, car leur auteur fut la première à montrer que les jouissances apparentes retirées du péché sont irréelles et insubstantielles, que la durée leur fait défaut parce qu'elles sont pareilles à des ombres évanescentes et trompeuses. La conscience de l'irréalité de ses joies enlève au péché sa puissance apparente. En outre, dans la Christian Science, l'être humain surmonte la tentation pour des motifs bien supérieurs à ceux qu'inspire la connaissance des suites que peut avoir notre faiblesse. La crainte du châtiment peut être nécessaire à la régénération, mais elle constitue le motif le plus vulgaire; à mesure que le disciple s'élève, il apprend qu'une connaissance de la réalité du spirituel et la recherche constante d'une vision plus nette et plus haute, développent un amour plus fort pour tout ce qui est pur et vrai, ainsi que l'aversion de ce qui n'est que matériel et temporel. C'est par la prière et par une consécration de nos énergies à des activités plus nobles, que la poursuite des satisfactions purement matérielles et mondaines peut être supprimée.
La thèse de la crainte est combattue, elle aussi, par de nombreuses promesses scripturaires telles que celles-ci: "L'amour parfait bannit la crainte," et "Je ne craindrais aucun mal, car tu es avec moi." Encore une fois, la vision prophétique de notre Leader vient en complément des paroles des anciens prophètes, car elle fournit l'arme la plus efficace qu'on puisse imaginer, à savoir, une compréhension de l'impotence de la crainte par le fait de la toute-puissance de Dieu. A la page 454 de Science et Santé nous lisons ceci: "La compréhension, quelque faible qu'elle soit, de la Toute-puissance divine, détruit la crainte et affermit vos pas dans la bonne voie,— la voie qui mène à la demeure qui n'est pas faite de main d'homme, et qui est 'éternelle dans les cieux;' " et à la page 412: "Le fait fondamental que Dieu gouverne tout avec amour, ne punissant jamais que le péché, est le point de départ d'où vous devez avancer pour détruire la crainte humaine de la maladie."
C'est ainsi que la ligne de démarcation entre la vraie et la fausse prophétie est de plus en plus nettement définie par une adhésion loyale au Principe fondamental de la Christian Science. Les appas de ce monde et le sentiment de la crainte sont surmontés par la compréhension de leur irréalité et de leur impuissance, comme aussi par celle de la toute-activité et de la toute-présence de l'Esprit. Il peut sembler difficile d'atteindre un état d'existence qui permette de vaincre la crainte et les convoitises terrestres, mais toute tentative, toute démonstration, si infime soit-elle, hausse la qualité de nos ambitions et établit toujours plus solidement le fait que la conscience qui est l'Amour divin détruit toute appréhension.