Le droit à une juste récompense pour le travail ou l'œuvre accomplie est un des premiers que les hommes aient généralement reconnu. A l'heure actuelle, aucun autre droit n'est plus près d'être universellement admis. En ce qui concerne l'avenir, la protection de ce droit, qu'il faut mettre à l'abri des restrictions et des substitutions, mérite la vigilance et l'appui mental non seulement des économistes et des hommes d'État, mais encore de tous ceux qui cherchent le bien de l'humanité. Nul autre droit — si l'on en excepte la liberté de pensée — n'est essentiellement apparenté aux véritables intérêts de la société humaine.
Dans l'état actuel des choses, le droit à une rétribution équitable accordée au travail est si près d'être universellement reconnu que personne ne l'attaque directement et explicitement. On peut se demander si le bolchévisme constitue ou implique la tentative d'instituer une des formes de l'esclavage: c'est là matière à discussion; mais il ne devrait y avoir qu'une opinion touchant les mauvais effets des loteries ou de tout système prévoyant le risque d'un petit enjeu et l'espoir d'obtenir une forte somme. Tous ces projets ont pour résultat de détourner la pensée des récompenses équitables qui doivent être méritées; ils déprécient nécessairement, non seulement le motif qui pousse les hommes à travailler, mais encore le droit qu'ils possèdent de gagner de l'argent par le travail ou par l'œuvre accomplie.
Au début du siècle passé, les économistes et les hommes d'État des pays qui forment l'avant-garde du monde civilisé, reconnurent nettement les mauvais effets du jeu en général et des loteries en particulier. Des excuses ou des prétextes trompeurs ont seuls pu permettre à ces abus de se perpétuer ici et là jusqu'à notre époque. La Loterie d'État de la Louisiane ne fut supprimée qu'en 1891, mais on peut s'expliquer la raison d'une telle persistance par le fait que la compagnie qui dirigeait cette loterie offrait annuellement un million deux cent cinquante mille dollars pour le renouvellement des sanctions légales en sa faveur. Aujourd'hui même, l'État Libre d'Irlande organise ou sanctionne une loterie qui cause un tort énorme, en dépit des buts louables auxquels en sont attribués les profits.
Le 5 mai 1931, les Amis ou Quakers d'Irlande approuvèrent et publièrent une motion comprenant les paragraphes suivants:
“Les membres de la Société Religieuse des Amis, réunis en Assemblée Annuelle et représentant toute la Société telle qu'elle existe en Irlande, ont constaté avec un profond chagrin l'extension considérable du jeu dans l'ensemble du pays depuis que les agences de paris ont été légalisées et que des loteries en faveur des hôpitaux ont été instituées dans l'État Libre d'Irlande.
“Nous sommes convaincus que les paris et le jeu, répréhensibles au point de vue moral, sont en outre des causes directes de pauvreté, de misère et de crime; que l'excitation malsaine qu'ils engendrent diminue la capacité d'accomplir honnêtement une tâche régulière, et nuit à la formation des habitudes de travail, d'économie et d'indépendance.”
Les profits des “Loteries Irlandaises” servent exclusivement à l'État Libre d'Irlande; mais les innombrables petits enjeux qui fournissent ces profits viennent en partie de l'étranger, et les maux incalculables que causent les loteries ne s'arrêtent pas aux frontières du pays qui obtient de l'argent par ce procédé.
Personne ne prétendra qu'un labeur religieux ou spirituel ne mérite pas une rétribution équitable; mais les praticiens de la Science Chrétienne ont souvent observé la tendance à ignorer ce droit, ou à ne pas le reconnaître d'une manière pratique avant que d'autres obligations aient été remplies. Jérémie disait (22:13): ”Malheur à celui. .. qui fait travailler son prochain sans le payer, sans lui donner son salaire.” Paul dit: “De même, le Seigneur a ordonné que ceux qui annoncent l'Évangile vivent de l'Évangile” (I Cor. 9:14). Ces paroles s'appliquent aussi bien aux praticiens de la Science Chrétienne qu'à tous ceux qui rendent d'autres services.
Il est évident que le droit à une juste rétribution pour des services rendus doit être protégé contre les abus ou les perversions de tout genre. Ainsi, celui qui a travaillé pour autrui devrait certainement tenir compte des résultats de son labeur lorsqu'il fixe son prix. Dans des procès où les services professionnels étaient en cause, les tribunaux ont estimé que les bons résultats ou leur absence éventuelle devaient entrer en ligne de compte lorsqu'il s'agissait d'évaluer ces services (6 Corpus Juris 752). Mrs. Eddy a parlé d'une manière spéciale de cet aspect de la justice. (Voir Christian Healing 8:19‒23; Manuel de l'Église, Art. VIII, Sect. 22; The First Church of Christ, Scientist, and Miscellany 204:23). Elle a même formulé catégoriquement l'éthique financière de la Science Chrétienne pour tous ceux qui pratiquent cette Science, lorsqu'elle a dit (Rudiments de la Science Divine, p. 14): “Il faut à présent qu'ils demandent pour leurs services un prix raisonnable, et qu'ensuite ils gagnent consciencieusement leur salaire.”