J’assistais, il y a quelque temps, à un match de tennis professionnel où figuraient deux des meilleures joueuses du monde. A un moment crucial, la joueuse qui dominait la partie fit un service magnifique et la balle était impossible à renvoyer. Le juge de ligne décréta qu’il y avait « faute », mais l’adversaire savait que le service était bon. Elle hésita un moment, puis elle se dirigea calmement vers l’autre côté du court, signifiant ainsi aux juges que ce service était tout à fait dans les règles.
Personne n’aurait trouvé à redire si la joueuse avait accepté cette erreur, car presque tous les joueurs de tennis se réjouissent d’une décision du juge de ligne qui est en leur faveur, surtout lorsqu’une somme considérable et leur prestige sont en jeu, comme c’était le cas dans ce match. Mais cette joueuse ne s’inspirait pas des pratiques de la majorité. Elle avait, de toute évidence, un certain respect de la justice et de l’honnêteté.
Au travail et entre amis, quelle est notre réaction quand nous constatons que les pratiques de la majorité ne sont pas conformes aux principes de la morale ? Et quand nous découvrons que les masses sont sur une mauvaise voie, une voie qui n’honore pas Dieu ?
Une étude inspirée de la Bible nous aide à être moins influencés et moins intimidés par l’opinion de la masse et à entrevoir la force spirituelle de l’individu. La Bible nous présente bien des cas où une seule personne inspirée par Dieu a prouvé l’erreur des multitudes. Ainsi, par exemple, la crédibilité de maladies largement acceptées fut sapée par des guérisons instantanées. Des armées immenses furent vaincues par de petits groupes de personnes qui s’appuyèrent radicalement sur Dieu pour être protégées et guidées. Le nombre ne fait donc pas forcément droit, puissance ni autorité.
Avec seulement trois cents hommes, Gédéon, sous la direction de Dieu, mit en déroute une gigantesque armée ennemie. La Bible dépeint ses adversaires comme « une multitude de sauterelles, et leurs chameaux étaient innombrables comme le sable qui est sur le bord de la mer » Juges 7:12.. Gédéon, cependant, reçut explicitement l’ordre de ne pas se fier au nombre. Avant d’aller à la bataille, nous dit le livre des Juges, il renvoya chez eux près de trente-deux mille membres de son armée. Et la victoire fut remportée sans difficulté grâce aux trois cents hommes qui restèrent.
Ailleurs dans la Bible, nous lisons l’histoire du prophète Élie, qui, à lui seul, défia et discrédita les quatre cent cinquante prophètes de Baal. Néhémie, lui, dirigea la reconstruction des murs démolis de Jérusalem, en dépit de voisins antagonistes et supérieurs en nombre. Et l’Ecclésiaste raconte l’histoire d’un homme pauvre et sage qui délivra sa petite ville, apparemment sans défense, du siège mené par un roi puissant. Voir I Rois 18:19–39; Néh., chap.1–6; Eccl. 9:14–16.
Si on s’en rapporte à l’histoire biblique, il est bien clair que le mal se prétend rarement infime en nombre. Il déclare: « Légion est mon nom, car nous sommes plusieurs. » Marc 5:9. Dans l’Apocalypse, le mal est représenté par « un grand dragon rouge, ayant sept têtes et dix cornes, et sur ses têtes sept diadèmes » Apoc. 12:3.. Pareillement, le mal peut nous suggérer: « Ce problème est décidément trop compliqué. Cela fait tant de jours que tu es aux prises avec cette difficulté, tu as passé par tant de moments de souffrance, tu as tellement prié ! » Le mal tente de nous impressionner et de nous déprimer en nous donnant l’illusion de l’importance du nombre pur et simple.
Mais David arrêta Goliath. Christ Jésus dispersa la légion des démons. Ainsi le verdict nous est-il déjà acquis ! Les prétentions du mal, même si elles sont acceptées, même si leur nombre est impressionnant, n’ont ni substance réelle ni vérité. Elles ne possèdent rien de la force et de l’autorité qu’elles revendiquent. La force et l’autorité résident du côté de Dieu seul, et de toute personne disposée à affirmer sa position dans l’Amour omnipotent.
Et c’est ce que Dieu nous rend capables de faire. Nous ne sommes pas créés pour rester pétrifiés devant le dragon, à compter sa multitude de têtes, de cornes et de couronnes. Nous sommes créés pour adorer et exprimer Dieu, pour manifester le bien omnipotent et ainsi exercer la domination que Dieu confère à l’homme. Lorsque nous consacrons de plus en plus nos journées à la démonstration du bien, nous finissons par voir que le mal n’a pas d’identité et que Dieu n’a pas limité le bien que peuvent accomplir ceux qui se tournent vers les choses de l’esprit.
Mary Baker Eddy, qui fonda une Église où l’on met l’accent sur les capacités et les responsabilités individuelles de source divine, exprime ainsi cette idée: « L’homme n’est-il pas, métaphysiquement et mathématiquement, le nombre “un”, une unité et donc un nombre entier, gouverné et protégé par son Principe divin, Dieu ? Il vous suffit de conserver un sentiment positif et scientifique de votre unité avec votre source divine et de démontrer chaque jour cette unité. Alors vous constaterez que le nombre “un” est un facteur aussi important que des myriades quand il s’agit de vivre et de faire ce qui est juste, démontrant ainsi le Principe divin. Une goutte de rosée reflète le soleil. Chacun des petits agneaux du Christ reflète l’infini Un; la déclaration sage du prophète est donc vraie, à savoir qu’ “un seul du côté de Dieu constitue une majorité”. » Pulpit and Press, p. 4.
Naturellement, il faut que chacun soit certain que lorsqu’il prend position contre une façon de faire générale, cela lui est prescrit par Dieu. Certaines protestations, émises au nom de l’individualité « inspirée », peuvent en fait avoir leur source dans l’égotisme et la recherche du pouvoir personnel. Il faut apprendre à obéir à l’injonction de Jean: « Bien-aimés, n’ajoutez pas foi à tout esprit; mais éprouvez les esprits, pour savoir s’ils sont de Dieu. » I Jean 4:1. Alors, et alors seulement, on peut découvrir que « rien n’empêche l’Éternel de sauver au moyen d’un petit nombre comme d’un grand nombre. » I Sam. 14:6.
Les capacités illimitées de l’individu sont soulignées dans un passage du livre d’étude de la Science chrétienne, Science et Santé, où Mary Baker Eddy écrit: « Moïse amena un peuple à adorer Dieu en tant qu’Esprit, non en tant que matière, et il mit en lumière les sublimes capacités humaines de l’être conférées par l’Entendement immortel. » Science et Santé, p. 200.
Nous pourrions peut-être nous demander quelles qualités de pensée rendirent un homme capable de faire progresser toute une nation. Moïse fit preuve d’obéissance envers Dieu, de persistance et d’un grand courage, qualités que nous pouvons assurément exprimer dans une certaine mesure. Mais la Bible fait ressortir un trait particulièrement essentiel du caractère de Moïse: « Or Moïse était un homme fort patient, plus qu’aucun homme sur la face de la terre. » Nombres 12:3. Si nous devons réussir dans l’œuvre spirituelle que Dieu nous a prescrite, il serait sage de cultiver une humble patience. Nous pouvons abandonner la volonté personnelle et la vanité souvent associées aux nombres et apprendre calmement à nous laisser guider par Dieu. Quand nous persistons à faire cela, il n’y a pas de limites à l’impact guérisseur que peut avoir notre vie.
Notre opposition aux croyances de la majorité ne sera pas efficace, cependant, si elle se fonde simplement sur une différence de croyance. Par exemple, la croyance qu’on peut avoir en la Science Chrétienne ne l’emportera pas sur la multitude de ceux qui croient que l’on doit avoir un certain nombre de rhumes chaque année. Quand nous nous opposons à une opinion aussi majoritaire, nous devons, nous dit Mary Baker Eddy, baser notre dissentiment « sur la Science ». Parlant de l’acceptation massive des médicaments, elle écrit: « Lorsque la croyance générale attribue tel ou tel effet au médicament inanimé, le refus individuel d’y souscrire ou la foi individuelle, à moins que la Science n’en soit la base, n’est que la croyance d’une minorité, et une telle croyance est gouvernée par celle de la majorité. » Science et Santé, p. 155.
Notre tâche est donc de baser nos protestations contre le mal sur la Science de notre être qui est divinement établie, et non de les prendre à notre compte. En soi, l’opinion ou la volonté individuelles l’emportent rarement sur une maladie largement acceptée. Mais en fondant notre dissentiment sur la Science, nous cédons au fait que Dieu et l’homme sont à jamais unis — non pas simplement parce qu’un mortel le dit, mais parce que, en quelque sorte, Dieu le dit. Cette unité précieuse ne ménage aucun asile à la maladie.
Quand les Écritures déclarent que l’homme est fait à l’image et à la ressemblance de Dieu, cette déclaration est précédée des trois mots essentiels: « Puis Dieu dit... » Gen. 1:26. L’identité de l’homme dérive donc totalement de Dieu et n’est jamais définie par l’opinion mortelle des masses.
En acceptant la réalité immuable de ce que Dieu dit, nous édifions véritablement « sur la Science ». Nous reconnaissons que l’image de Dieu est, de par sa création, éternellement pourvue de la domination, de la santé et de l’harmonie, que la maladie ne fait pas partie de cette individualité véritable, n’étant jamais soutenue ni même permise par Dieu. Nous percevons le fait que le Législateur de l’homme est Dieu, et non des millions d’esprits humains. Nous voyons que chacun a le droit et l’intelligence d’affirmer sa position dans l’amour de Dieu, amour purificateur, rédempteur et tout-puissant.
Puisque Dieu est entièrement bon, qu’Il cause la santé et non la maladie, l’abondance et non la limitation, la vie et non la mort, il est sensé d’admettre que le mal et même la mort peuvent être vaincus, non pas seulement parce qu’on nous le dit, mais parce qu’il est conforme à notre véritable nature de dépendre de la bonté de Dieu, qui est réelle et puissante. Dieu est vrai et la vision mortelle de l’homme est un mensonge, c’est pourquoi nous cultivons la force morale et spirituelle en apprenant à distinguer la vérité divine des croyances élaborées par l’homme.
La prière fervente et l’étude de la Bible, ainsi que des écrits de Mary Baker Eddy, nous permettent de faire la distinction entre la vraie nature scientifique de Dieu et de l’homme, et les opinions et philosophies humaines. Tout en progressant dans ce travail, nous acquérons une conception inébranlable de l’omnipotence et de l’omniprésence de Dieu et de la perfection de l’homme. En acceptant cela comme la loi de Dieu, et non pas comme une simple croyance humaine, nous voyons le fait que le mal est impuissant et absent commencer à se faire jour dans notre conscience. Nous découvrons que la taille effroyable et la quantité impressionnante qui semblent caractériser le mal sont de fausses conceptions, que le mal a été surestimé et doit compter pour zéro. Bien que nous devions prouver le néant du mal pas à pas, par la croissance et la régénération spirituelles, le fait spirituel n’en demeure pas moins que le mal est impuissant. Nous voyons qu’il ne peut jamais rien être ajouté à la création parfaitement complète de Dieu, qui inclut l’homme, et qu’il n’y a rien à en retrancher non plus. Cette compréhension mène naturellement à une paix individuelle plus profonde et à la guérison.
Le ministère de guérison de Christ Jésus nous montre l’effet guérisseur d’un dissentiment individuel fondé « sur la Science », c’est-à-dire sur une compréhension exacte de Dieu et de l’identité de l’homme. Jésus a prouvé que la maladie n’est pas une nécessité. Des millions d’esprits humains croyaient à la lèpre et la redoutaient, mais cela ne put faire obstacle à la compréhension qu’avait Jésus de l’action et du pouvoir de l’Amour divin.
Lorsque dix lépreux s’adressèrent à lui pour être guéris, ils furent complètement purifiés en peu de temps. Voir Luc 17:12–14. Jésus prouva de façon convaincante que « rien n’empêche l’Éternel de sauver ». Le Maître démontra que le mal, qui prétend faussement avoir force et abondance, n’a aucune autorité valide quand on s’y oppose comme il faut.
Comment pourrait-on douter que des êtres individuels qui obéissent à la vérité de Dieu possèdent une force plus grande que des multitudes qui obéissent à des croyances d’origine humaine ? Il nous suffit d’affirmer notre position avec calme, persistance et courage, dans l’amour libérateur de Dieu. Alors nous nous réjouissons de voir que le mal largement accepté ne peut annuler la sollicitude tendre et toute-puissante de Dieu à l’égard de chacun de Ses enfants. Nous découvrons que nos capacités individuelles d’accomplir le bien sont illimitées parce que nous sommes en fait l’expression spirituelle infinie de Dieu. Et nous constatons que la force ne provient pas de la fermeté des opinions personnelles, mais émane de notre obéissance soutenue à la Parole de Dieu.