La découverte de la Science Chrétienne par Mary Baker Eddy occupe une place bien définie dans le calendrier de l’histoire. Il en va de même pour la fondation de la Science Chrétienne ainsi que pour la publication de Science et Santé avec la Clef des Ecritures et du Manuel de L’Eglise Mère, réalisations que l’on doit également à Mary Baker Eddy. Sans devoir indiquer ici de dates précises, ces trois activités ont eu un début et une fin. Mais à mesure que nous les comprenons plus profondément, en découvrant de nouvelles perspectives, elles continuent de porter des fruits dans la pensée et l’action humaines. Toutefois, la découverte et la fondation de la Science Chrétienne sont désormais achevées, et aucune modification ne peut être apportée au texte de Science et Santé ou du Manuel de l’Eglise de Mary Baker Eddy.
Il en va autrement du leadership de Mary Baker Eddy au sein du mouvement de la Science Chrétienne. Ce leadership n’a pas de fin dans la chronologie des événements. Il a toujours cours et il en sera toujours ainsi. Le 3 juin 1891, un an avant que Mary Baker Eddy réorganise son Eglise en tant que La Première Eglise, du Christ, Scientiste, elle écrivit une lettre à ses élèves réunis à Boston. Elle leur apportait cette assurance : « Je demeure avec vous sur le champ de bataille, allant de l’avant, saisissant des vues plus larges et plus élevées et avec l’espoir que vous suivrez. » (Ecrits divers 1883-1896, p. 136) Quelque deux ans plus tôt, Mary Baker Eddy avait quitté Boston pour venir habiter à Concord, dans le New Hampshire, où elle allait résider pendant presque vingt ans. Mais dans cette lettre, elle leur explique ses intentions. Elle n’avait pas quitté le champ du labeur ni renoncé à son leadership.
Le 4 décembre 1910, les fidèles présents au service du matin de L’Eglise Mère entendirent une annonce lue du pupitre, juste avant la bénédiction finale. Cette annonce leur apprenait le décès de Mary Baker Eddy durant la nuit précédente, et ses paroles citées plus haut étaient reprises dans l’annonce. Le Conseil des directeurs de la Science Chrétienne, établi par Mary Baker Eddy, et les autres officiers de L’Eglise Mère héritaient désormais de la responsabilité accrue de s’acquitter des obligations qu’elle leur avait assignées dans le Manuel de l’Eglise. Mais en tant que Leader du mouvement de la Science Chrétienne, Mary Baker Eddy demeurait et resterait à la tête de ses disciples, ce qui avait toujours été sa place.
Un Leader qui suit le Christ
A l’époque où Mary Baker Eddy se faisait connaître comme Leader, ce terme ainsi que celui de leadership avaient en général bonne presse. Or depuis la Première Guerre mondiale, du fait de certains événements historiques et de l’évolution de la société, ces termes ont pris une connotation quelque peu différente. D’une part, depuis quelques décennies, on les assimile étroitement à des tyrannies politiques monstrueuses ; d’autre part, les gens, les populations, sont de plus en plus nombreux à vouloir vraiment se gouverner eux-mêmes sur le plan personnel et politique. Ils se rebellent contre un leadership fort ou contre ce que l’on pourrait considérer comme le « star system » qui touche la politique et la société. La combinaison de ces deux évolutions a créé dans la sphère intellectuelle, et certainement dans tous les pays démocratiques, une réserve prudente à l’égard de tous ceux que l’on appelle « leader » ou qui prétendent exercer un leadership. Et lorsque s’exprime parfois le désir d’un leadership à l’ancienne, c’est sans doute plus de la nostalgie qu’une réflexion profonde. On ne l’envisage pas comme une solution valable aujourd’hui.
Les scientistes chrétiens, quant à eux, participent activement à la mission de rédemption du Christ, et cela inclut la rédemption des concepts justes et utiles qui ont pu être salis par des associations douteuses. La Découvreuse et Fondatrice de la Science Chrétienne adopta le titre de Leader dans un but bien précis. Elle assurait ainsi au mouvement de la Science Chrétienne un leadership effectif continu. C’est pourquoi on pourrait voir dans l’altération profonde des termes « leader » et « leadership » une tentative de plus du magnétisme animal de tirer vers le bas pour enterrer la révélation de la Science du Christ et sa démonstration permanente sur terre. Il appartient aux scientistes chrétiens, dans leur utilisation de ces termes, d’en préserver le sens véritable et la pertinence. Pour cela il nous faut comprendre l’histoire et la nature du leadership de Mary Baker Eddy.
Dès le mois d’août 1879, le terme « Leader » en référence à Mary Baker Eddy a commencé à se répandre parmi ses élèves, et on l’a employé de plus en plus dans les périodiques de la Science Chrétienne. Finalement, à partir de 1903, Mary Baker Eddy a reconnu officiellement ce terme dans une disposition statutaire du Manuel de l’Eglise (voir Manuel, art. XXII, sect. 1)
Or, deux ans avant l’adoption officielle de ce terme, Mary Baker Eddy a clairement et publiquement indiqué sur quelle autorité reposerait son leadership. Vers la fin de son Message de 1901 à L’Eglise Mère, elle conclut un certain nombre d’instructions aux membres par ces mots : « … obéissez strictement aux lois en vigueur, et ne suivez votre Leader que pour autant qu’elle suit le Christ. » (p. 34) Au début de son Message de 1902 à L’Eglise Mère elle revient sur ce point : « Je le répète une fois encore : “Ne suivez votre Leader que dans la mesure où elle suit le Christ.” » (p. 4) Le leadership officiel reconnu à partir de 1903 ne devait donc pas être arbitraire. Il se plaçait sous l’autorité du Christ, tandis que le leader de la Science Chrétienne marchait humblement, comme elle s’efforçait toujours de le faire, sur les pas du maître chrétien et guide, Jésus-Christ. Le leadership de Mary Baker Eddy est à la fois profondément scientifique et profondément chrétien.
Durant sa vie terrestre, Mary Baker Eddy a guidé le mouvement de la Science Chrétienne dans ses premiers pas jusqu’à sa croissance adulte et son expansion. L’histoire de cette période a été relatée avec force détails par divers biographes et dans des écrits biographiques et historiques. Ces récits montrent la sagesse et la détermination avec lesquelles les perceptions spirituelles de Mary Baker Eddy ont guidé son Eglise en toute sécurité face aux nombreux dangers qui l’assaillaient – attaques directes ou obstructions et résistances plus subtiles.
A l’époque, de nombreux systèmes de pensée imitaient et contrefaisaient la Science du Christ qu’elle avait découverte dans toute sa pureté. En nulle autre circonstance son leadership n’a été aussi nécessaire et n’a été exercé avec autant de constance et d’efficacité que pour diriger le mouvement de la Science Chrétienne à travers ce bourbier. Maintes et maintes fois Mary Baker Eddy a suivi la voie juste non seulement avec sagesse et amour, mais également avec une clarté et une fermeté jamais démenties.
L’étude du leadership de Mary Baker Eddy durant cette période formatrice est riche d’enseignement. Mais il est également très important que les scientistes chrétiens comprennent la nature du leadership de Mary Baker Eddy qui s’est poursuivi sans interruption jusqu’à aujourd’hui et continuera dans l’avenir.
Pas de culte de la personnalité
Très tôt, Mary Baker Eddy s’est opposée vigoureusement à toute tentative de transformer son leadership en culte de la personnalité et de la mettre sur un piédestal. Son comportement envers les autres n’était ni froid ni hautain ; au contraire, même durant ses dernières années de retrait relatif à Concord et à Chestnut Hill, elle était chaleureuse, s’intéressait aux autres et se montrait affectueuse. Les membres qui habitaient dans sa maison, toutes les personnes qu’elle faisait venir pour traiter des affaires essentielles ou qu’elle invitait chez elle, notamment les jeunes enfants, ont manifestement perçu ces qualités en elle. Mais en paroles et en actes, elle encourageait sans cesse les gens à se détacher de la personnalité. Elle désirait qu’on la cherche dans ses livres. C’est là qu’on pourrait vraiment la trouver, en étudiant et en vivant le Christ puissant, la Vérité, qui lui avait été révélé. De cette façon, ses disciples seraient guidés non vers la personne, mais vers le Principe, la Vérité divine, pour laquelle, comme elle l’explique elle-même, elle était « un scribe recevant des ordres » (Ecrits divers, p. 311).
Aujourd’hui, en tant que Leader permanent de la Science Chrétienne, Mary Baker Eddy n’exerce pas davantage son leadership par sa personnalité ou toute autre forme de présence personnelle. Ses disciples trouvent l’inspiration dans ses écrits publiés, ce qui les oriente vers le Christ et le Principe divin, l’Amour. Bien qu’impersonnel, ce leadership est chaleureux et affectueux. Il parle à chacun en tant qu’individu pour qui le Leader de la Science Chrétienne éprouve un amour, une sollicitude et un intérêt profonds.
Les grands leaders, surtout ceux dont les adeptes sont nombreux et dispersés dans le monde, doivent toujours s’assurer que leurs messages atteignent chacun de leurs partisans sans rien perdre de leur exactitude ni de leur force. Faute de quoi ces messages sont perdus ou dénaturés en passant de bouche à oreille selon des voies hiérarchiques ou d’un messager à l’autre. Or dans le Manuel de l’Eglise comme dans le livre d’étude, Science et Santé, Mary Baker Eddy a résolu ce problème de façon unique.
Dans le Manuel de l’Eglise, en tête de la liste des officiers de l’Eglise, juste avant les statuts, on trouve le nom de la révérende Mary Baker Eddy, Pasteur Emérite. Son pastorat émérite, comme son leadership, représente ainsi une charge permanente. C’est pour chaque membre du mouvement de la Science Chrétienne l’assurance que, tout en aimant et en soutenant ceux qui occupent un certain temps les autres postes d’officiers de l’Eglise, et tout en obéissant scrupuleusement aux statuts, il ne sera jamais séparé du Leader de la Science Chrétienne, qui est aussi son Pasteur Emérite.
Un incident relaté par William Dana Orcutt jette une lumière sur ce point. Un jour, Orcutt demanda à Mary Baker Eddy s’il devait la consulter à propos de certains sujets, sans passer par son chef, l’éditeur Joseph Armstrong. Il nota la réponse de Mary Baker Eddy : « Cela ne passera par-dessus aucun chef ; M. Armstrong a été engagé pour m’assister et exécuter mes instructions. Je suis le chef. » (Mary Baker Eddy and Her Books [Mary Baker Eddy et ses livres] (Boston : The Christian Science Publishing Society, 1950), p. 58) En se tournant vers le Manuel de l’Eglise, chaque membre de l’église a un accès direct aux indications impersonnelles et permanentes de Mary Baker Eddy.
Leadership et gouvernement de soi-même
Dans le livre d’étude, comme dans le Manuel de l’Eglise, l’auteur s’adresse à chaque lecteur individuellement sans notion de temps, de lieu ni de personne. Dans Science et Santé, elle ne s’adresse pas à un lectorat de masse. Elle ne s’adresse pas à ses lecteurs depuis un certain passé, un endroit précis ou du haut d’un piédestal, ni même depuis le centre de la Science Chrétienne à Boston. Elle s’adresse directement à eux, dans leur foyer, à leur bureau, dans leur église filiale ou leur salle de lecture, sur terre, sur mer ou dans les airs, partout dans le monde où un scientiste chrétien lit Science et Santé, chaque fois qu’une assemblée de fidèles ou qu’un petit groupe écoute la lecture qui en est faite. Et elle s’adresse à chacun individuellement.
Parlant à chacun, le Leader de la Science Chrétienne dit pour tous les temps et en tous lieux : « J’espère, cher lecteur, que je vous amène à comprendre vos droits divins, l’harmonie que vous donne le ciel – j’espère qu’en lisant vous voyez que, en dehors du sens erroné, mortel et matériel, qui n’est pas pouvoir, il n’y a pas de cause capable de vous rendre malade ou pécheur ; et j’espère que vous êtes en voie de vaincre ce faux sens. » (Science et Santé, p. 253)
Le leadership de Mary Baker Eddy est donc celui d’un mouvement et d’une Eglise, mais c’est aussi un leadership fondé sur une relation individuelle. Il amène ceux qui le suivent non à se soumettre – de façon personnelle ou dans un cadre politique ou social – mais à comprendre ses droits divins individuels et à s’affranchir de l’asservissement sous toutes ses formes. « Dieu a doué l’homme de droits inaliénables, parmi lesquels on compte le gouvernement de soi-même, la raison et la conscience, écrit Mary Baker Eddy. L’homme n’est bien gouverné par lui-même que lorsqu’il est bien guidé et gouverné par son Créateur, la Vérité et l’Amour divins. » (ibid., p. 106) Le vrai leadership n’a aucun rapport avec les systèmes politiques tyranniques de ce siècle ni avec tout ce qui voudrait affaiblir l’autonomie individuelle. Comme le montrent le leadership de Mary Baker Eddy et sa fidélité au Christ, le vrai leadership aboutit à un gouvernement de soi-même spirituel et universel qui accomplit le dessein créateur de la Vérité et de l’Amour divins. Sa discipline réside dans la plus stricte, quoique la plus flexible, de toutes les disciplines : l’autodiscipline ; une discipline qui ne demande à personne de renoncer à son identité nouvellement découverte et libérée.
L’avenir de ce leadership
Qu’en est-il de l’avenir ? Mary Baker Eddy a emprunté aux paraboles de Jésus le symbole du levain. Elle s’attendait à ce que les enseignements de la Science Chrétienne fassent lever, pénètrent et transforment la pensée scientifique, religieuse et médicale de son époque, et en fait la pensée à la base de toute activité humaine. Cela se produit déjà, bien que souvent les scientistes chrétiens eux-mêmes ne le reconnaissent pas. Les caractéristiques visibles du mouvement de la Science Chrétienne, avec ses édifices, ses activités et ses membres, ne sont qu’une petite partie du progrès que le leadership de Mary Baker Eddy a apporté à un monde en train de se réveiller.
A mesure que l’effet du levain s’amplifie, il est probable que la Science du Christ suscite de plus en plus d’approximations. Si elles reflètent un progrès et des intentions louables, ces approximations ne reconnaissent pas forcément ce qu’elles empruntent à la Science du Christ, et tant en pensée qu’en acte, elles n’en ont pas la pureté. Alors de même que les premiers scientistes chrétiens ont été guidés à travers les obstacles et les contrefaçons, grâce au leadership de Mary Baker Eddy, comme il a été expliqué plus haut, ainsi les scientistes chrétiens d’aujourd’hui et de demain seront guidés en toute sécurité, sous son leadership, face à la tentation de se satisfaire d’approximations. Elle continuera de guider les progrès de son mouvement grâce à la Parole pure de la Vérité, et les approximations continueront de « lever » jusqu’à céder finalement à la plénitude de la Science Chrétienne et de sa démonstration.
Dans la mesure où Mary Baker Eddy suit le Christ, son leadership fait partie du déroulement de la mission de salut qui consiste à sauver, non condamner, le monde que Dieu a tant aimé et qu’Il aime tant. Cette mission nous ramène, à travers les pages de la Bible, aux commencements de l’histoire humaine. Il faut qu’elle se poursuive à travers l’histoire jusqu’à ce que cette histoire humaine cède finalement au fait divin, à savoir l’homme révélé à la ressemblance de Dieu, spirituel et complet.
Le Psalmiste priait Dieu ainsi : « Envoie ta lumière et ta fidélité ! Qu’elles me guident ! » (psaume 43:3) C’est dans cet esprit que Jésus priait, comme en témoigne sa vie entière. C’est dans cet esprit que Mary Baker Eddy priait tandis qu’elle suivait le Christ. Et c’est aussi la prière de tous les scientistes chrétiens qui suivent leur Leader sur les pas du Christ, la Vérité.
